Temps partiel façon ANI ?

Publié le 21 avril 2013 | Mise à jour le 20 avril 2013

C’est de temps plein dont les salariés ont besoin !

Texte publié suite à la réunion publique unitaire anti ANI du Jeudi 18 avril 2013 à la Bourse du travail de Lyon.
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Alors que le Parlement débat de « la sécurisation de l’emploi » qui vise à transposer dans la loi l’Accord National Interprofessionnel du 11 janvier dernier, les dispositions relatives au temps partiel qui figurent dans ce dernier sont présentées, par nombre de commentateurs, comme une avancée sociale.

Le développement du temps partiel, majoritairement féminin et subi, et la précarité qui s’y attache justifient qu’on remédie à une telle situation mais certainement pas de la manière suggérée par les signataires de cet accord : ainsi, la future loi portera à 24 heures la durée minimale de travail à temps partiel, une disposition qui existe déjà dans de nombreuses conventions collectives, sans pour autant être correctement mise en œuvre. De plus, la nouvelle loi ne s’appliquera pas aux contrats en cours et cette durée minimale pourra être réalisée chez plusieurs employeurs, augmentant ainsi, pour beaucoup de salariés, la fatigue liée aux déplacements nécessaires à la réalisation de leurs différentes heures de travail…

Plus encore, il pourra être dérogé à cette durée sur « demande écrite et motivée du salarié » : c’est faire litière du lien de subordination qui existe, un lien exacerbé dans les secteurs d’activité où le temps partiel est majoritaire tels que le commerce, le nettoyage ou les services à la personne.

De même, la Ministre déléguée aux droits des femmes s’est félicitée du fait que les heures complémentaires seraient majorées de 10 % dès les premières heures effectuées, les suivantes restant elles majorées à 25 %, une majoration là encore pas toujours respectée. Or cette timide avancée serait immédiatement annihilée par l’instauration de « compléments d’heures par avenant », une disposition jusque-là condamnée par la Cour de cassation et rejetée par l’actuelle majorité, alors dans l’opposition !

Ainsi, les employeurs pourront augmenter par accord huit fois par an (sur combien de semaines ? de mois ?) le temps de travail du salarié temps partiel, y compris à temps plein sans que ces heures ne soient nécessairement majorées et encore moins prises en compte pour augmenter les horaires du salarié, comme l’exige le Code du travail.

Il y a pire encore : la possibilité sera donnée aux branches de définir « le nombre et la durée des périodes d’interruption d’activité au cours d’une même journée » (deux heures maximum actuellement) et « le délai de prévenance préalable à la modification des horaires » (une semaine à ce jour). Un tel dispositif remettrait tout bonnement en cause les garanties issues de la loi Aubry sur l’Aménagement et la Réduction du Temps de Travail, une loi votée par un gouvernement socialiste

En faisant disparaître tout ce qui entrave le recours systématique au temps partiel, le législateur prendrait un risque plus grave : celui de la disparition, à terme, du temps complet !

On l’aura compris : plutôt que d’améliorer l’existence de ces travailleurs, ces dispositions la leur rendront plus invivable encore. Le législateur serait plus inspiré de renforcer l’applicabilité des droits existants dont celui obligeant à accorder en priorité le passage à temps plein pour les salariés à temps partiel qui le souhaitent et en donner de nouveaux tel que la saisine directe du bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes pour faire requalifier un contrat à plein temps, à l’instar de la disposition existante pour les CDD. Et, s’il est réellement dans l’intention du gouvernement de dissuader les entreprises qui abusent du temps partiel, de porter la majoration des heures complémentaires au même niveau que celles des heures supplémentaires !

Signataires :
Karl Ghazi (CGT Commerce Paris), Catherine Vinet-Larie (conseillère prud’homale CGT), Laurent Degousée (SUD Commerce/Solidaires), Annick Coupé (Solidaires), Etienne Deschamps (syndicat CNT Solidarité Ouvrière du Nettoyage), Clémence Helfter (Osez le féminisme) Pierre Khalfa (fondation Copernic), Christiane Marty (commission Genre d’ATTAC)

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