Béziers : La citoyenneté est un sport de combat…

Béziers : La citoyenneté est un sport de combat

paru dans CQFD n°130 (mars 2015), par Sébastien Navarro, illustré par Revenu
mis en ligne le 06/04/2015

En 2014, Robert Ménard remportait la mairie de Béziers (Hérault) avec le soutien du Front National. Multipliant des arrêtés municipaux tout à la fois antisociaux et grotesques, l’édile s’est montré un habile provocateur. Un temps sonné, le peuple biterrois relève la tête. Et le poing.
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Par Julien Revenu.

Mercredi 18 février, 8 h du matin. Le mercure du thermomètre peine à dégivrer sous les 4°. A gauche, minérale et déserte, la place du 14-Juillet. En ligne d’horizon, les immenses cubes de la médiathèque André-Malraux imposent leurs 8 000 m2 de surface. Au coin de la rue d’Alsace, un duo de bigotes attend dans le froid les premières âmes à guider vers la lumière de Dieu. Leur pancarte annonce  : « Où trouver les réponses aux grandes questions de la vie ? » Peut-être sur l’affiche surplombant leurs têtes où trône le nouvel « ami » de la police municipale biterroise. Un 7.65 semi-automatique avec un écusson bleu-blanc-rouge sur la crosse. Avant de faire couler le sang, le dernier coup de pub du maire Robert « Dirty Harry » Ménard a fait couler beaucoup d’encre. Une nouvelle fois, les journalistes sont venus radiographier cette ville de Béziers.

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Par Julien Revenu

Couvre-feu pour les mineurs de 13 ans, arrêté anti-crachats ou anti-linge aux fenêtres  : à la tête de la ville depuis un an, Robert Ménard a su démontrer qu’avant d’être un habile gestionnaire, il était un communicant des plus retors. Objectif de la manœuvre : insuffler dans l’espace urbain le poison lent et continu d’une peur diffuse. Non pas celle du déclassement social ou de la misère mais de cette plèbe bigarrée qui occupe encore le cœur de la ville. De 1975 à 1999, la ville a perdu plus de 15 000 habitants. Tandis que les classes moyennes fuyaient l’intra-muros pour s’installer dans les villages périphériques (ah  ! L’irrésistible tropisme du bonheur pavillonnaire !), la métropole montpelliéraine finissait d’aspirer la jeunesse biterroise. Ceinturant la ville, les grandes zones commerciales (Villeneuve-lès-Béziers, Polygone, etc.) finissaient de terrasser le réseau des petits commerces de la cité. Béziers, ville sinistrée, la triste devise n’allait plus quitter les basques de la sous-préfecture de l’Hérault. Hormis pour le top ten des villes les plus pauvres de France, la cité biterroise restait hors course, promise à la longue pente du déclin. Un symptôme ne trompait pas  : les kébabs fleurissaient sur les dignes allées Paul-Riquet.

Romancier et homme de théâtre, Gilles Moraton est aussi bibliothécaire, spécialisé dans les livres anciens. On prend place dans une grande salle de lecture de la médiathèque. Les portes ne sont pas encore ouvertes au public. « J’imagine que vous êtes venus me voir pour la lettre ? » L’homme hésite, rappelle qu’il est soumis à un devoir de réserve. Avant de se regonfler  : le maire n’est pas son supérieur puisque la médiathèque dépend de la communauté d’agglo. « Ménard a la même démarche que tous les maires frontistes élus précédemment dans les villes du Sud. Sauf qu’en plus, c’est un communicant. Tout en critiquant les médias, il sait s’en servir. » Gilles est calme, souriant. Dans sa tête, les digues ont sauté lorsqu’il a découvert la dernière campagne de pub de Ménard. Coupler l’image d’un pistolet avec le mot « ami », la provoc fut celle de trop  : « J’ai fait une lettre ouverte qui part du constat qu’une arme ne peut pas être un ami. C’est d’abord un objet destiné à tuer. Pour moi, c’est une apologie de la violence, un appel à la haine. C’est aussi une façon de préparer les gens à la guerre, à sa guerre à lui. » La lettre a été mise en ligne le mercredi 11 février, 200 partages sur Facebook en deux heures. « Ça m’a très étonné. Je ne m’y attendais pas. Le fait que j’exprime ce que beaucoup pensent a agi comme un catalyseur. » Courte, sobre, la missive interpelle le premier élu biterrois jusque dans les recoins les plus pathogènes de sa politique  : « Vous voulez choquer, vous voulez qu’on parle de vous dans les médias nationaux, votre immense ego ne peut se satisfaire du silence et pour ce faire, vous n’hésitez pas à faire appel aux instincts les plus bas, à la part sombre des individus, la protection du clan contre l’ennemi. Mais l’ennemi, Robert Ménard, l’ennemi est surtout dans votre tête, vous êtes votre propre ennemi, et le fait que vous ayez reçu le pouvoir du peuple ne vous autorise pas à ramener le peuple dans la préhistoire. » Lire la suite ici

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